Tursan n’est pas – avouons-le – la zone viticole de France la plus huppée.
Reconnue en A.O.V.D.Q.S. en 1958, elle ne doit son accession à l’A.O.C. en 2011 qu’à la disparition de la catégorie des vins délimités de qualité supérieure.
Cette appellation à la réputation modeste mérite néanmoins que l’on s’y attarde.
Tursan s’étend sur la côte de l’est de la Chalosse, aux confins des Landes, de la Gascogne et du Béarn, dans les méandres de la rive gauche de l’Adour, sur les premiers plissements pyrénéens. Là, à l’ouest d’Aire-sur-l’Adour, les vignerons ont privilégié les parcelles en coteaux, sur le territoire de 36 communes (35 au sud-est du département des Landes et 1 dans le département du Gers) réparties autour de l’ancienne bastide de Geaune.
La vigne – minoritaire, dispersée et morcelée – s’insère dans un pays de polyculture-élevage où le maïs occupe une place importante.
On dénombre une petite centaine de vignerons, pour la plupart adhérents de la coopérative «Les Vignerons Landais», laquelle traite quelques 95 % des volumes. Aussi, se comptent sur les doigts d’une main les caves particulières.
Bénéficient de l’appellation les vins blancs tranquilles blanc, rosé et rouge.
Les vins blancs sont issus des plants suivants :
- cépages principaux : baroque et gros manseng,
- cépages accessoires : chenin, claverie (01), petit manseng, raffiat de Moncade, sauvignon blanc et sauvignon gris.
Les vins proviennent d’un assemblage dans lequel les deux cépages principaux sont obligatoirement présents dans une proportion minimale de 50 %, la proportion de chaque cépage principal étant inférieure ou égale à 60 %.
Le cépage local qu’est le baroque (02) serait un croisement entre le sauvignon et la folle blanche.
Cépage local disais-je car sa zone de production est confinée sur Tursan pour l’essentiel.
Il a la réputation de donner un vin très sec, nerveux, emprunt de vivacité.
Le chef Michel Guérard (triplement étoilé au Michelin depuis 1977, 5 toques au Gault et Millau) – concepteur de la nouvelle cuisine minceur – est surtout connu pour son complexe d’hôtel-restaurant à Eugénie-les-Bains.
Mais il a plusieurs cordes à son arc. Parmi celles-ci, le château de Bachen, domaine viticole où la démarche est raisonnée : ainsi, l’entretien du sol s’effectue par des labours, désherbant ou insecticide étant prohibés.
La cuvée ‘Baron de Bachen’ est le haut de gamme.
Les vendanges sont manuelles.
Le millésime 2012 reçoit 30 % de sauvignon, 30 % de baroque, 20 % de petit manseng et 20 % de gros manseng, bénéficiant d’un élevage partagé à parts égales entre inox et fût.
Le nez est discret mais évolutif : des notes d’agrume (citron), végétales (feuille, bois blanc), florales (berce), d’infusion (verveine) ou encore de réglisse.
Le palais est incisif, en lame de rasoir. C’est incontestablement un vin qu’un plat doit accompagner. Aussi, je suggère un pavé de saumon poché puis snacké accompagné d’une sauce mousseline montée au beurre de baratte aux algues de Jean-Yves Bordier et de carottes croquantes. Poisson gras et beurre feront le contre-point en bouche.
Ce vin déjà à maturité mais qui se gardera deux ou trois ans, je conseille de le servir et le maintenir plutôt frais que froid.
Voilà un Tursan que je conseille à cent pour cent.
© Photo nicolas le lièvre
(01) Avant 1850, l’encépagement destiné à la production de vins blancs reposait essentiellement sur le cépage claverie. Avec l’arrivée de l’oïdium, ce plant très fragile ne put être sauvé que partiellement.
(02) Ou barroque.
